mercredi 14 avril 2010

Incompétence

Il est midi au salon du personnel tandis qu’entre un cadre visiblement imbu de lui-même. Ses coudes sont un peu trop loin de son corps, et sa chemise, un point trop grand, retombe sur l’étui d’un cellulaire hors-service. L’incompétence affairée.

Étrangement, il se montre attentionné : « Ma priorité : le bien-être des étudiants ». Il se veut drôle également : « On verra ça sur le terrain de golf, ma Johanne…» Sauf qu’il cherche les rires après ses sarcasmes poivre et sel, après ses agaceries qu’on trouve, au demeurant, déplacées, aussi subtiles qu’un rire gras. Personne ne l’aime.

Il met la table, le cadre, et le voilà blablatant de son projet qui accouchera, mort-né, on le sait. Aussi aborde-t-on d’autres sujets, plus pertinents, qui le concernent. Pleuvent alors interrogations brutes, requêtes d’acier doux, doléances affutées, réprimandes mitraillées qui atteignent, plein cœur, son incompétence. Belle balistique.

Le cadre fait alors un pas vers la porte de sortie, fait un quart de tour, puis s’immobilise, faisant face au tableau de Picasso – «Guernica». Or, ce qui me semblait être une rétractation couarde me paraît soudainement intellectualisée. Cette pantomime étudiée, répétée – et cette pose – nous oblige à supposer qu’il est à la fois réceptif et vaillant. Un machiavellito.

« On va quand même se laisser sur une note positive, hen? », trop audible-t-il, avant de tirer les rideaux.

Applaudissements.

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